Une nouvelle

Les pas de Luneil avaient finalement atteint Binla, la cité de son avenir. Son premier réflexe avait été de chercher la face visible de l'ordre dans la ville et la forteresse qui siégeait sur les hauteurs en était la parfaite représentation pour elle. Elle s'était donc dirigée vers ce bastion de l'armée, espérant qu'elle pourrait y trouver un emploi. Ses facultés le lui permettraient sûrement, mais elle préférait ne pas tarder. Sans argent, elle ne vivrait pas longtemps parmi les hommes.

Luneil passa la herse d'entrée et demanda au soldat de garde ici où se trouvait le recrutement. L'homme la regarda de bas en haut, l'air suspicieux. La jeune femme lui renvoya un regard dur comme l'acier pour le convaincre de sa capacité à faire parti de l'armée. D'un geste, il lui indiqua une file d'attente un peu plus loin dans la cour. Luneil se plaça à la suite et commença à patienter. Même si ce n'était pas sa principale qualité, elle savait attendre lorsqu'il le fallait.

Candidats, candidats, et encore des candidats. Essuyant plusieurs refus de suite, Barus s'impatientait. Les gens croyaient-ils vraiment qu'entrer dans la garde était de tout repos ? Certains pensaient, à tord, qu'il suffisait d'indiquer les points vitaux de la ville et de passer le reste de son temps à vaquer dans les rues de Binla. Cette pensée naïve exaspérait le colonel.

Un nouveau candidat arriva devant lui. Ou plutôt devrait-il dire une candidate. Il détailla la jeune femme d'un regard sévère. Lui, n'avait jamais vraiment accepté que les femmes fassent partie de la garde. Trop de problèmes. Avec les civils, avec les autres soldats. A ses yeux, une femme se devait de s'occuper des enfants et de la maison, et c'en était déjà très bien. Mais son métier ne lui permettait pas de faire de distinctions entre homme et femme, tout comme elfe et orc. Seules les compétences comptaient.

"Présente-toi."

Sa voix était froide, sèche et grave. Il n'avait pas comme habitude de jouer le sentimental, et encore moins le gentil. Les futures recrues devaient savoir ce qui les attendait. De la force et de l'autorité. Et une forte hiérarchie.

Son regard croisa celui de la jeune femme. Son regard était aussi ténébreux que la jeune femme était grande. Son visage était charmant, entouré d'une chevelure sombre. C'était le genre de femme que Barus appréciait regarder.
Mais là n'était pas son travail, et rien ne semblait pouvoir desceller ses pensées.

Ce fut finalement le tour de Luneil de se présenter pour le recrutement. L'homme qui se tenait devant elle parla froidement, mais la jeune femme ne cilla pas. Elle savait à quoi s'attendre et avait gardé les habitudes que son père lui avait données. Ses yeux rencontrèrent ceux du militaire. Elle aurait pu sourire, mais elle n'en fit rien. Le charme n'avait pas à servir dans l'armée. Elle entama d'une voix calme :

"Je me nomme Luneil Dremien. Je suis à la recherche d'un travail et je suis ici car je veux défendre Binla."

Elle ne savait pas exactement quels renseignements voulait le recruteur. Mais se doutant qu'il souhaitait connaître un peu ses capacités martiales, elle ajouta :

"Je maîtrise bien l'arbalète et un bon nombre d'armes légères."

Cela suffisait certainement, elle n'allait pas s'étendre en informations inutiles. Elle pensait avoir dit le strict nécessaire, mais s'il manquait quoi que ce soit, l'homme ne tarderait sûrement pas à le lui faire comprendre. Maintenant, restait à voir si sa candidature lui paraissait crédible.

Le recruteur acquiesça d'un signe de tête. Il était déjà satisfait du comportement de la jeune femme. Ainsi que par ses renseignements. Elle semblait être apte à être concise et précise, quoiqu'elle aurait pu l'être un peu plus.

"Qu'entends-tu par armes légères ?"

Il savait très de quoi elle parlait, mais il souhaitait lui poser des questions, la mettre à l'épreuve et l'observer. Lorsqu'elle eut donné sa réponse, il enchaîna.

"Es-tu enclin à un exercice ?"

On pouvait sentir qu'il s'adoucissait. Sa question en était la preuve : il aurait tout autant pu lui en donner l'ordre. Malgré son apparence bourrue, Barus était quelqu'un de très gentil, qui n'aimait pas se faire d'ennemi. Il avait juste un grade et une position à garder : celle de chef.

L'homme lui demanda effectivement des précisions sur les armes légères qu'elle maniait. Elle répondit donc, toujours sur le même ton :

"Les bâtons, les dagues, les épées courtes, longues ou bâtardes, les sabres... et un peu les lances."

Elle pensait avoir fait le tour de ce que son père lui avait enseigné. Le recruteur considérait d'ailleurs qu'elle avait répondu et lui posa une nouvelle question. La manière dont il le demandait ne sonnait très pas militaire aux oreilles de Luneil, mais elle ne laissa rien paraître. Décidée à le convaincre, elle n'allait pas refuser un test pratique. Elle hocha la tête.

"Oui."

Puis, ne sachant pas si on allait lui fournir une arme ou autre, elle ajouta, préférant l'avertir :

"Je n'ai qu'un couteau pour le moment."

"Tu penses qu'une lance est une arme légère ?"

Lui ne le pensait pas, ou les deux personnages n'avaient pas la même vision de la lance. Elle répondit à la positive quant au combat, ce qu'il attendait d'elle. Il fut aussi satisfait de voir qu'elle garda une attitude militaire malgré la façon dont il avait parlé. Il décida donc de ne pas l'habituer à ce genre d'attitude.

"Je n'ai qu'un couteau pour le moment."

"T'ai-je demander ce que tu as ?"

Barus était jugé comme quelqu'un de changeant et de lunatique. C'était en partie vrai, bien qu'il pensait qu'il était tout simplement militaire : tester sans cesse ceux qu'il fréquentait, même si ça sous-entendait des changements brusques de comportement. D'un doigt, il désigna une table où plusieurs armes de basse qualité étaient déposées.

"Là-bas, prends ce que tu souhaites."

Il sortit sa lame de son fourreau et attendit le retour de la jeune femme. Il appréciait le combat et regrettait un peu l'absence de bataille épique dans de vastes plaines, galopant à fière allure vers une armée ennemie semblable à une nuée ardente. Maintenant, il ne faisait que des tours de garde, de l'entrainement, et du recrutement. Il était tout de même satisfait de la bataille qui avait eu lieu, bien qu'elle avait été mortelle pour une bonne partie de l'armée.

Luneil ne tiqua pas à la réplique cinglante du militaire. Mais elle avait quand même été surprise par le changement brutale dans son comportement. Peut-être s'était-il trouvé trop doux dans sa précédente question et qu'il ne voulait pas qu'elle le croit trop gentil. Il lui montra par un geste la table sur laquelle elle pourrait se choisir une arme. Elle s'en approcha et regarda rapidement ce qui s'offrait à elle. Evidemment, les armes n'étaient pas de très bonnes qualités, mais il fallait savoir se débrouiller avec n'importe quoi. Elle opta pour une épée longue qui lui semblait assez équilibrée. Elle lui fit tracer quelques cercles en l'air pour l'avoir bien en main puis repartit vers l'homme.

Il l'attendait, l'arme en main. Elle le jaugea du regard. Elle-même était grande, mais il la dépassait quand même de beaucoup. Sa musculature laissait deviner sa force et Luneil conclut immédiatement qu'elle ne devrait pas tenter d'opposer trop longtemps sa lame à celle du guerrier. Elle jouerait sur sa rapidité et sa souplesse, ses principaux atouts. Elle se campa devant l'homme et plaça sa garde, attendant le signal du début de l'exercice.

Barus observa la jeune femme revenir. Celle-ci avait pris une épée longue qui semblait correspondre assez bien avec le style de Luneil. Ou, du moins, c'était le style que Barus avait imaginé lui correspondre.

Elle se plaça devant lui et attendit, ce qui plut au colonel. Elle comprenait qu'elle ne devait rien faire sans son ordre. Il la jaugea du regard avant de lancer :

"C'est parti !"

Son épée était dressée vers le ciel, presque collée à lui. Il attendit qu'elle lance sa première attaque.

[Combat rp, tout simplement ^^]

[j'ai pas trop eu le temps moi non plus ce week-end ^^]

Le soldat s'était mis en garde et avait annoncé le début du combat. Luneil passa à l'attaque, c'était à elle de montrer ses capacités. D'un pas souple, elle s'approcha et plaça son premier coup. Assez rapide et surtout précis, avec la longue lame de son épée. Mais bien entendu, l'homme para sans difficulté. Elle ne resta pas en place un instant de plus pour éviter qu'il ne force sur son épée.

D'un mouvement fluide, elle enchaîna pour porter une nouvelle attaque. Plus rapide que la première, et dirigée vers le bas. Elle poursuivit son assaut, fendant l'air de son arme, changeant aussi rapidement de cible que le fer virevoltait. Mais rien à faire, la garde de l'homme semblait presque infranchissable. Tout résidait dans le presque.

Malgré ses attaques rapides et répétées, Luneil gardait une respiration calme, à peine plus accélérée que la normale. Son entraînement n'avait pas servi à rien. Elle ne se décourageait pas et se décida enfin. Un pas en avant, coup sur la gauche. Se fendre, revenir sur la droite. Et le coup final. Qui devait porter à la jointure de l'armure du guerrier. Elle comptait arrêter son arme juste avant de le blesser. Mais encore fallait-il qu'elle le touche... L'avait-il vu venir ?

Barus était prêt, sa lame visant le ciel. La jeune femme s'élança, harmonieuse, souple et agile tandis que sa première attaque se préparait. Sa lame fendit l'air, et, de son arme d'argent, le colonel intercepta le coup, se préparant déjà à pousser son adversaire au poids-plume. Mais celle-ci, doutant bien de sa force, ne tarda pas, et lança de suite une seconde attaque que le soldat esquiva, laissant glisser la lame de son adversaire le long de son épée.

Les vagues d'attaques se suivaient et les sons métalliques ne cessaient plus. Barus n'avait encore tenté aucun coup, autant pour voir ce dont était capable la jeune femme que par la cadence, bien qu'il avait connu pire, qu'elle imposait.

Une certaine monotonie avait pris place dans les quelques coups qu'elle donnait, et Barus pensait bien qu'elle ne continuerait pas ainsi longtemps. Et ce qu'il avait pensé fut, elle lança son attaque sur son côté droit que le colonel s'apprêtait à parer, sa lame déjà en position. Au dernier moment, Luneil se ravisa et fit virevolter sa lame sur la gauche, lançant son épée à vive allure. Il regretta l'absence d'un bouclier qui l'aurait grandement aidé. D'un geste rapide, l'homme s'élança en arrière, suivant le chemin de la lame pour l'esquiver plus aisément. Il échappa ainsi à l'attaque traîtresse de la jeune femme et en profita pour porter sa première attaque.

Sa lame fendit l'air, s'apprêtant à attaquer d'estoc, mais prêt à arrêter sa lame si Luneil était dans l'incapacité d'esquiver son attaque considérée comme bien plus dangereuse et mortelle qu'une attaque de taille.

[HRP] Pas grave, je connais aussi ^^ [/HRP]

Son adversaire avait reculé et de cette manière avait esquivé son attaque. Luneil savait qu'elle allait subir la contre-attaque de l'homme. Elle s'y attendait depuis l'instant où elle avait choisi de porter cette attaque. Car l'échouer était s'exposer à l'adversaire. Et le recruteur ne pouvait pas ne pas en profiter pour la tester.

Luneil vit la lame trancher l'air, comprenant que la seule solution pour elle était d'esquiver. Pour ce mouvement, elle allait devoir utiliser toute sa souplesse. Son pied glissa sur le côté pour lui permettre de se plier et d'éviter la lame meurtrière. Elle ne doutait pas que l'homme aurait stoppé son attaque à temps, mais elle préférait se donner au maximum. Son corps décrivit une courbe et elle put se redresser. Mais non sans avoir sentit cette sueur froide dans le cou. Ce n'était vraiment pas passé loin. Et si l'homme avait voulu, il l'aurait certainement touché, car son expérience devait être bien plus grande.

Luneil reprit son assaut, beaucoup plus rapidement qu'avant et ne le continua pas longtemps. Elle tenta une nouvelle passe et comptait sur sa rapidité d'exécution pour prendre l'homme de court. Si cette fois, cela échouait encore, elle romperait l'affrontement.

La jeune femme semblait présenter de nombreux atouts. Il ne l'en avait pas cru capable, mais elle avait esquivé son attaque. Bien sûr, il aurait pu modifier légèrement la trajectoire de son épée et suivre la jeune femme, mais il ne voulait pas la décourager. Ce qu'elle lui montrait lui semblait déjà très satisfaisant.

Luneil reprit ses attaques, ne cessant d'accélérer la cadence de ses coups. Barus commençait à apprécier ce combat. Un léger sourire se dessina sur les lèvres du colonel. Soudainement, elle reprit une attaque plus rapide que les autres. Barus ne savait pas si elle comptait reprendre une attaque du même type que la précédente, ou si elle avait une autre botte.

Mais celle-ci renouvela sa feinte. Le colonel, s'y étant préparé, fit glisser aussi rapidement sa lame que celle de son adversaire et vint stopper net son attaque. Il observa la jeune femme.

"C'est satisfaisant", finit-il par lâcher. "Ta place est ici, soldat."

Il glissa sa lame dans son fourreau avant de continuer :

"Tu peux venir demain au bureau pour recevoir tes ordres."

Il esquissa un léger sourire.

"Si tu as besoin d'une maison, il y en a dans notre quartier : il est réservé aux gardes. Si tu n'as pas d'armes, nous pourrons t'en prêter le temps lors de tes heures de garde."

Le guerrier para la lame de Luneil. Le combat était terminé. Il la regardait avec attention, il avait l'air content de son combat. Il lui annonça finalement qu'elle était prise. Elle y était, elle faisait parti de la Garde ! Une sourire naquit sur ses lèvres.

Luneil reposa l'épée longue sur la table, écouta les paroles du recruteur jusqu'au bout puis s'inclina.

"Bien."

Elle hésita un bref instant avant de faire à nouveau face à l'homme. Elle éprouvait déjà un certain respect pour lui, mais pour le moment, elle ne le connaissait qu'en tant que recruteur.

"Excusez moi, pourrais-je connaître votre nom ?"

Barus observa avec intérêt la jeune femme lorsqu'elle lui demanda son nom. Un léger sourire étira son visage avant qu'il ne réponde.

"Excuse-moi, j'ai failli à tous mes devoirs, je pense. Je m'appelle Fulvius Barus, membre et colonel de la garde des dragons, au service de Sa Majesté, la reine."

Il ne savait pas vraiment si la jeune femme connaissait l'importance de son rang, colonel, mais ça ne lui importait pas. A ses yeux, et même si la hiérarchie était d'une grande importance, le respect se gagnait par les actes, et non par le titre. Certains soldats dégageaient plus de respect que certains sergents.

"Avez-vous d'autres questions ?"

Ils n'avaient encore pas abordé le sujet du salaire, et Barus se demandait si elle voulait en savoir plus. Quant à lui, le colonel ne se sentait pas obligé de le lui dire. Il n'était même pas obligé, normalement, de donner des informations : il se contentait de dire oui ou non lorsque l'on venait postuler à la garde. Mais il ne pouvait pas laisser les recrues seules et abandonnées, alors, il les aidait comme il le pouvait.

Luneil écouta avec attention la réponse de son recruteur. Fulvius Barus. Elle grava le nom de cet homme dans sa mémoire. Elle nota aussi au passage son grade, colonel, qui, si ses souvenirs étaient bons, était plutôt élevé au sein de l'armée. Mais cela ne changea en rien l'opinion qu'elle avait de cette personne et était contente de ne pas l'avoir su plus tôt. Cela aurait peut-être influé son avis.

Quand Barus lui demanda si elle avait d'autres questions, Luneil fit un signe négatif de la tête.

"Non, merci. C'était tout ce que je voulais savoir."

Puis elle le salua et prit la direction de la sortie, non sans jeter un coup d’œil à la longue file des prétendants au rang de la Garde. Sans un regard en arrière, elle rejoignit de son pas souple la herse d'entrée et continua sa route pour redescendre dans les ruelles de la ville. Maintenant qu'elle avait son travail, il fallait qu'elle se trouve un logement. Puisqu'un quartier était réservé à la Garde, autant en profiter.

» A l'aube d'une nouvelle aventure